La pandémie de COVID 19 a touché de plein fouet l’ensemble de la planète. Le premier foyer est apparu à la mi-décembre 2019 à Wuhan en Chine et s’est répandu en France à partir de fin janvier 2020. Le « confinement » est une des mesures sanitaires mise en place par les gouvernements pour limiter la propagation du virus. En France cette mesure sanitaire a été mise en place du 17 mars au 11 mai 2020 et imposa à la population le maintien au domicile et la limitation des déplacements au strict nécessaire. L’ARS ordonna alors la déprogrammation massive des interventions chirurgicales programmées afin de mettre à disposition des lits en secteur de réanimation. Seules les urgences ont été assurées  selon les recommandations émises par les différentes sociétés savantes de chaque spécialité. Concernant la chirurgie maxillo-faciale les pathologies qui ont été prises en charge durant cette période sont les infections (dentaires, osseuses et salivaires), les traumatismes faciaux, les pathologies tumorales (en privilégiant les techniques les moins lourdes).

Qu’en est-il de la traumatologie faciale durant le confinement ?

A la clinique des Ormeaux, en dehors des urgences infectieuses et carcinologiques, 5 patients ont nécessité une prise en charge chirurgicale maxillo-faciale durant le confinement:

cas n°1 : Mr Morgan F âgé de 35 ans épileptique connu est admis pour une fracture de Le Fort I, du plancher d’orbite gauche ainsi qu’une fracture déplacée du nez suite à une crise d’épilepsie probablement en rapport avec des séances prolongées de jeux vidéo.

cas n°2 : Mr Christophe S âgé de 50 ans pris en charge pour une fracture de l’os zygomatique suite à une chute dans les escaliers à domicile dans un contexte d’éthylisme chronique.

cas n°3 : Me Françoise B âgée de 65 ans aux antécédent d’épilepsie pharmaco-résistante est transférée du service de neurologie de l’hôpital Monod pour la prise en charge d’une fracture/enfoncement  de l’os zygomatique droit suite à une crise d’épilepsie (fig1).

Fig1 : Fracture enfoncement de l’os zygomatique gauche

cas n°4 : Mr Florent D âgé de 30 ans opéré d’une fracture bifocale de mandibule suite à un coup de poing reçu au visage.

cas N°5 : Mr Romuald G âgé de 38 ans opéré d’une plaie profonde de la face par un coup de couteau suite à une rixe dans un contexte d’éthylisme aigue.

Il est intéressant d’analyser les étiologies particulières de ces traumatismes faciaux. En effet le confinement a inévitablement entrainé une baisse des accidents de la route et des accidents de sport (1,2,3). Ces deux étiologies sont en temps normal les principales causes de traumatisme de la face. Par contre les violences domestiques semble avoir augmentées durant cette période de 2 à 8% selon les études (1). En effet le fait d’être contraint de rester isolés chez soi entraîne de l’anxiété, de la peur et exacerbe les tensions au sein de la famille et expose aux actes de violences physiques, verbales ou psychologique (5-6).

Les crises d’épilepsie comme dans les cas n°1 et 3 sont des causes de traumatismes un peu plus inattendues. Cependant les études montrent que les patients épileptiques ont été plus vulnérables pendant le confinement.  et ont donc été plus à risque de déclencher de nouvelles crises (6,7,8). Les raisons semblent multiples:  des difficultés à se procurer leur traitement, des difficultés de suivi (réduction de la réalisation des EEG car réservé uniquement aux urgences), difficultés dans l’observance des traitements, modifications des habitudes de vies ( manque de sommeil, changement d’alimentation, augmentation de la consommation d’alcool) mais également d’une plus grande susceptibilité à la détresse psychologique  (9).

Le confinement dans le cadre de la pandémie de COVID-19 a modifié l’épidémiologie des causes de traumatisme.  Il est utile de les connaître pour mieux les prévenir. Le développement de la télémédecine permettra probablement un meilleur suivi des patients à risque en cas de nouvelle situation de crise.

Dr MOURE Christophe, Chirurgie Maxillo-faciale

 


1-Effect of statewide social distancing and stay-at-home directives on orthopaedic trauma at southwestern level1 trauma center during the COVID-19 pandemic. J Orthop trauma. 2020 sep;34(9) 343-348

2-Evaluating the effects of COVID-19 on plastic surgery emergencies: protocols and analysis from a level I trauma center. Hassan K. et al. Ann plast surg, 2020,jun 2:10.1097

3- Facial Trauma Management during the COVID-19 era: a primer for surgeons. Suhani Ghai. Curr Med Res pract. 10 (2020) 169-173

4- Approaches to the management of patients in oral and maxillofacial surgery during COVID-19 pandemic. Zimmerman M. et al. J Craniomaxillofac Surg 48 (2020) 521-526

5- Home is not always a haven: The domestic violence crisis amid the COVID-19 pandemic. Kofman Y et al. Psychol trauma 2020 aug;12.199-201

6- Domestic violence and COVID-19: our hidden epidemic. Neil J. Aust J Gen Prat. 2020 Jun 11 ;49

7- the impact of covid 19 on epilepsy care: A survey of the American Epilepsy Society Membership. Albert D et al. Epilepsy Curr 2020 sep 17

8- what should we ask patients with epilepsy on telemedicine during COVID-19 crisis? A checklist for clinicians. Naoto Kuroda. Epilepsy Behav. 2020 May; 111

9- Severe psychological distress among patients with epilepsy during the COVID-19 out breack in southwest China. Xiaoting Hao et al. Epilepsia 2020; 1-8

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